En janvier 2012, à 40 ans, j’ai appris que j’étais porteuse du gène muté BRCA2 me prédisposant aux cancers du sein et de l’ovaire. J’avais deux possibilités : rester sous surveillance accrue avec une IRM mammaire ou une échographie tous les six mois, ou me faire enlever les seins et les ovaires.
J’ai opté pour la deuxième option, ayant beaucoup de mal à supporter cette épée de Damoclès et ces nombreux rendez-vous qui allaient devoir rythmer ma vie. Je ne voulais pas non plus que mes proches subissent mon éventuelle maladie.
Durant les dix mois qui ont précédé l’opération consistant à faire l’ablation des seins avec reconstruction immédiate par prothèses et l’annexectomie (trompes et ovaires), j’ai rencontré beaucoup d’obstacles. A ma demande de rencontrer d’autres patientes, on m’a répondu que c’était impossible à cause du secret médical. A part l’oncologue généticien et la chirurgienne qui m’a opérée, je n’ai reçu aucun soutien de la part du corps médical, soit par ignorance, car souvent je devais exposer mon projet, soit par opposition, les médecins étant contre le fait de se mutiler juste « au cas où ». Le suivi psychologique proposé n’était pas adapté, pour les mêmes raisons.
Mon entourage a été un réel soutien malgré la difficulté à concevoir ce que cela impliquerait. De mon côté, j’étais confiante et fière de ma décision. J’avais un coup d’avance sur la maladie.
Le 12 novembre 2012, jour de l’opération, est arrivé avec ses émotions contradictoires : le soulagement et l’anxiété.
Au réveil, après dix heures d’anesthésie, j’apprends que tout s’est bien passé malgré une douleur insoutenable et une sensation d’écrasement de la cage thoracique. Chaque mouvement est une torture. Je reste hospitalisée dix jours avec ces souffrances malgré la morphine. Je ne dors plus. Je rentre chez moi épuisée et douloureuse. C’est le début de mon calvaire qui durera jusqu’en 2020 avec des douleurs neuropathiques et une dépression. Plus aucun suivi de mes prothèses depuis cinq ans.
En 2019, je décide de revoir la chirurgienne, pour évoquer le changement de prothèses prévu tous les dix ans et elle m’apprend que celles que je porte sont macro-texturées et pourraient donner un lymphome (dans de rares cas) ; elles doivent être vérifiées avec une échographie.
Janvier 2020 j’apprends donc lors de ce contrôle que l’une de mes prothèses est percée et qu’il faut les remplacer. Paniquée, je me rapproche de l’association Geneticancer pour avoir un témoignage sur le changement de prothèses, opération tant redoutée. C’est là que tout a changé pour moi…
La nouvelle chirurgie mammaire m’a littéralement réparée sept ans et demi après la première ! Peu de douleurs, une bonne récupération (aidée par l’arrêt de travail forcé du confinement – je suis enseignante) et surtout Céline, ambassadrice Geneticancer, qui m’accueille et me propose d’intégrer l’association.
En juin 2020, je rejoins virtuellement (confinement !) la grande famille Geneticancer où je retrouve des sœurs de gène, de chirurgie, … Je ne suis plus seule, et je suis à ma place.
Depuis, je ne suis plus une victime de l’incompréhension, d’une malédiction mais une représentante de la lutte contre les cancers génétiques auprès du corps médical et du public. Je suis là pour informer et soutenir comme j’aurais aimé être soutenue il y a onze ans. Quel bonheur d’organiser des événements, de participer à des villages santé pour récolter des fonds ou juste nous faire connaitre ! Quelle fierté quand les médecins qui ne savaient plus comment m’aider me remercient d’être ambassadrice de cette belle association !
Mon nouveau moi est énergique, inspiré, motivé et j’ai développé grâce à cette aventure de nouvelles compétences insoupçonnées !