Annie

Date de publication du témoignage :

9 Nov. 2021

RDV avec Annie (Charleville-Mézières). Pair aidante en santé mentale, elle a écrit un livre racontant son parcours lié au cancer du poumon.

Décembre 2019, je viens de rentrer de Lyon où j’entame une année universitaire afin de préparer un D.U. (Diplôme Universitaire) en santé mentale.

J’ai cinquante-deux ans, je suis une femme de projets et je viens d’avoir les ailes coupées en plein vol par cette maladie qu’est le crabe.

Mi-novembre 2019, je consulte pour une bronchite chronique qui se transforme en bronchite asthmatiforme. Etant une très grosse fumeuse, je sais pertinemment pourquoi je souffre au niveau des bronches. Avec mon épouse, Sylvine, je me rends néanmoins à la faculté de Lyon où je dois reprendre mes études en santé mentale. Je suis bipolaire et stabilisée depuis une dizaine d’années, et particulièrement depuis cinq ans. Tout mon projet repose sur cette thématique et depuis trois ans, je travaille avec acharnement sur la pair- aidance. (La pair aidance est un métier en construction. Il s’agit de faire bénéficier de l’expérience d’anciens patients stabilisés aux patients encore malades d’une part, et d’autre part, réussir à intégrer des équipes pour travailler ensemble)

A Lyon, je ne suis pas en forme. Je suis fiévreuse, je tousse énormément et j’ai du mal à respirer… Durant toute la semaine, je m’efforce néanmoins de tenir sur les bancs de la faculté. On dit très souvent de moi que je suis une warrior, alors je serre les poings et j’étudie. Nous rentrons le samedi suivant mais les symptômes semblent s’aggraver. Je demande à mon épouse de m’emmener aux urgences. On est dimanche, je consulte donc à nouveau. Sylvine, qui est aide-soignante, guide le médecin. Ce dernier constate une température élevée et une saturation (taux d’oxygène dans le sang) très basse. Il pense à une pneumonie. Je repars chez moi avec un antibiotique à large spectre.

Cela sera donc un dimanche de repos sous la couette. Lundi soir, Sylvine m’appelle de son lieu de travail pour prendre de mes nouvelles. Elle constate mon air essoufflé, alors que je suis tranquillement allongée sur le canapé depuis le début de l’après-midi. A son retour du travail, tout en préparant mon sac, Sylvine me prépare surtout psychologiquement à une éventuelle hospitalisation.

Nous sommes en décembre 2019, je suis hospitalisée pour une pneumonie.

Je ne sais pas pourquoi, une intuition, je pressens que les choses sont sérieuses.

La soignante, en pneumologie qui vient me chercher me dit une phrase très culpabilisante et Sylvine la reprendra de volée plus tard dans notre histoire. Alors que je rentre pour une pneumonie dans un état pitoyable, l’aide-soignante me sert la phrase suivante : « Et ben, c’est malheureux d’en arriver là à cause de cette cigarette !!!! ». Mais qui est cette soi-disant professionnelle de santé qui m’assassine au lieu de me rassurer ?

Je suis en sueur, j’ai chaud, j’ai froid et j’ai cette femme qui me fait la morale !!!!

Il est 1h du matin, Sylvine souhaite m’accompagner dans ma chambre. Cette même aide-soignante refuse que mon épouse me suive. Sylvine a du caractère et impose sa présence….

Les médecins présents me font passer une radio des poumons. Ne me demandez pas pourquoi, est-ce là encore mon intuition, est-ce là encore ma capacité à lire sur les visages des professionnels, je sens qu’il se trame quelque chose de grave !

Nous sommes fatiguées, je m’installe dans ma chambre alors que mon amoureuse rentre à la maison, seule…

Le lendemain, après radiographie et d’autres examens, un médecin vient m’annoncer le verdict. Il est gêné, il cherche ses mots, je comprends…

« Le diagnostic est plus sombre», me dit-il.

Je le laisse s’exprimer mais je sais déjà ce qu’il va m’apprendre…

Le mot cancer est avancé avant même le résultat des biopsies ! Adénocarcinome ! Tumeurs malignes….

« Tu meurs », tumeurs…

« Tumeuras pas eu ! »

Ce terrible mot « cancer » fracasse mon mental !

Aujourd’hui, je n’ai plus de traitement du tout.

Mon oncologue dit que je me dirige vers une guérison.

Ce cancer m’a appris à prendre soin de moi en priorité mais je ne peux m’empêcher de me tourner encore vers les autres. En effet, avec mon épouse, nous avons validé auprès de l’ARS un projet d’accompagnement cas par cas, en oncologie/psychiatrie.

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