Sabrina

Date de publication du témoignage :

5 Avr. 2022

RDV avec Sabrina (Touraine). Après les traitements, vient le temps de l’après-maladie, long et compliqué. Elle en profite pour rappeler à quel point les aidants sont impactés eux aussi.

En Janvier 2019, à 33 ans, on m’a diagnostiqué un cancer du sein hormonodependant grade 3. Trois tumeurs localisées au même endroit du sein.
Tout commence par une visite chez un nouveau gynécologue, j’en avais besoin en urgence pour des soucis de contraception et ma gyneco habituelle manquait cruellement d’écoute. J’ai ouvert un site de rendez-vous en ligne et pris celui qui avait des disponibilités. Je me revois dans la salle d’attente, je guettais sa tête pour voir à qui j’avais affaire. Ainsi que mon impression quand je l’ai aperçu : « oh non c’est un vieux »…
Je lui raconte que j’ai perdu mon papa, il y a un peu plus de deux ans, d’un cancer du pancréas et que dans la foulée, ma maman a eu un cancer du sein. Il me dit alors « on va commencer les mammographies maintenant, ça ne fera mal qu’à la sécu mais je ne prends aucun risque. La sécurité sociale dit dépistage à 50 ans, moi je dis 40, et dès qu’il y a un cas dans la famille, dès que possible »… Sa sagesse m’aura sauvé la vie… En repartant, je réclame l’ordonnance et des coordonnées de lieu de confiance. Il m’en conseille deux, je choisirai le radiologue qui a le même prénom que mon défunt père. Je sors de son bureau avec un « ne vous pressez pas mais faites-le » en guise de conclusion.
C’est ce que j’ai fait. Mammo, puis écho qui dure avec échographe qui passe et repasse au même endroit, entretien avec le médecin et rendez-vous pour une irm et une biopsie. J’entre dans le cercle de l’attente et des angoisses. À partir du moment où le diagnostic a été posé, avec l’amour de mon conjoint, de mes enfants et ma famille, j’ai suivi étape par étape le parcours de soin. L’Institut Curie a été formidable, les médecins ont toujours eu des phrases d’encouragement et de bienveillance. On m’a rappelé de toujours garder le moral, car c’est « 50% du travail de guérison ». J’ai eu chirurgie, chimiothérapie, re-chirurgie, radiothérapie. J’ai profité de mes traitements pour m’écouter davantage, mes envies, mes plaisirs. J’ai toujours voulu prendre des cours de dessin mais je n’avais jamais franchi le pas… Cela a été un exutoire, mais aussi une façon de me montrer que je pouvais faire quelque chose de mes dix doigts.
En parallèle, je me suis mise au sport. Retrouver des capacités que l’on pensait perdues aide également à se reconstruire. Mon conjoint m’a dit « tu es la seule à ne pas voir que tu es forte, tu ne vois pas tout ce que tu fais, ce que tu as accompli »…
A la fin du parcours de soin, la psychiatre qui me suivait m’a diagnostiqué un burn-out post traitement, j’étais à bout nerveusement. C’est passé en continuant toutes les activités qui me faisaient du bien, en reprenant les projets de déménagement que nous avions mis entre parenthèses.
Trois ans après, je vais bien, même si j’ai encore des phases de grosse fatigue, des douleurs aux articulations, une prise de poids que je n’arrive pas à maîtriser à cause de l’hormonothérapie et la ménopause artificielle. Je vais bien car je suis en vie et que ces maux peuvent se soigner, ou au moins être adoucis. J’ai repris mon travail d’institutrice il y a un an et demi et je suis toujours à temps partiel. Je peux ainsi profiter de mes enfants. Pour eux qui avaient 2 et 4 ans au moment du diagnostic, ça reste très dur de voir maman fatiguée ou partir chez le médecin. Je pense sincèrement qu’il faut aider les accompagnants et que ça rentre dans le protocole de soin du malade… Mon conjoint m’a portée à bout de bras et ça a été dur pour lui aussi.
L’après-maladie est long et parfois compliqué, mais ça en vaut la peine.
Je réfléchis à différents projets artistiques sans réellement savoir quoi, mais on verra.

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